PARTIE 4 : PRATIQUE AMENAGEE
Outre l’exécution conventionnelle des mouvements olympiques, les haltérophiles intègrent dans leurs entrainements des exercices appelés « semi-techniques » qui se différencient des premiers, soit par une position de départ particulière, soit par une position d’arrivée particulière, soit par l’utilisation de matériel spécifique pour les exécuter. Ils permettent à l’haltérophile de mettre l’accent sur une ou des phases bien précises du mouvement, d’effectuer un renforcement musculaire spécifique ou de travailler plus particulièrement une qualité physique.
La sélection des exercices prend ici toute son importance dans la programmation des séances, si l’entraineur ou le préparateur physique maitrise les différents exercices et leur but, il pourra les utiliser à bon escient et au bon moment dans la préparation de l’athlète afin de développer les qualités souhaitées.
I – Les mouvements debout
- Ce qui diffère : en théorie la réception se fait sans flexion. On tolère et constate souvent une réception en ¼ de squat (pas de fémur sous la parallèle au sol).
- Objectifs :
– Coordination « membres inférieurs – membres supérieurs »
– Travail d’extension (amplitude et vitesse)
– Travail de vitesse du dos et des bras
- Quand les utiliser : En phase d’apprentissage ou d’initiation, en recherche de performance quand la technique de la chute n’est pas encore maitrisée.
Les athlètes utilisent les mouvements debout sans le savoir dès l’apprentissage, souvent à cause d’un manque de repères, de coordination et/ou de souplesse. Ce type de mouvement est souvent utilisé par les préparateurs physiques qui doivent donner des résultats à leurs athlètes sur le court terme. Bien sûr, ces mouvements ne doivent jamais remplacer un apprentissage complet du mouvement sur le long terme.
II – Les mouvements en puissance
- Ce qui diffère : il n’y a pas de saut ni de déplacement des pieds pendant l’exécution du mouvement. Les pieds sont dès le départ en position de réception. La réception peut se faire en légère flexion ou flexion complète.
- Objectifs :
– Travail de la liaison « fin d’extension – début de chute »
– Travail de la coordination « contraction – relâchement »
– Travail d’équilibre « corps – barre »
– Travail de trajectoire de barre
- Quand les utiliser : dans un cycle où la technique est privilégiée ou si l’on constate un manque de coordination entre la fin de l’extension et le passage sous la barre.
Ce type de mouvement est à utiliser plutôt chez des athlètes de niveau intermédiaire ou confirmé afin d’améliorer une des phases critiques de la technique d’exécution et de leur permettre de franchir un cap.
III – Les mouvements en force
- Ce qui diffère : il n’y a pas de saut ni de flexion, la finition se fait sur la pointe des pieds avec le corps tendu.
- Objectifs :
– Vitesse, équilibre, gainage
– Travail de renforcement musculaire de la ceinture scapulaire et des membres supérieurs
– Travail d’extension et de propulsion maximales
– Travail de trajectoire de barre
- Quand les utiliser : seuls dans une séance de renforcement musculaire ou après avoir travaillé les mouvements olympiques techniques. Il est intéressant de placer ce type d’exercice dans un cycle de puissance-vitesse.
En général un athlète ressent bien l’importance de la propulsion lorsqu’il effectue un mouvement en force. En effet si la vitesse n’est pas au rendez-vous, il est impossible de réussir ce type d’exercice avec une charge décente.
IV – Les passages et chutes
- Ce qui diffère : la position de départ se fait barre sur la nuque pour l’arraché et le jeté – barre sur les clavicules pour le jeté. On cherche à travailler le passage sous la barre et sa réception.
- Objectifs :
– Conscience du point d’appui que constitue la barre
– Travail de vitesse du groupé du corps
– Travail de vitesse de passage sous la barre
– Travail de réception en flexion
Quand les utiliser : en initiation, quand un athlète est réfractaire à l’idée de passer sous la barre ou qu’il a développé de mauvais schémas à cause d’une utilisation abusive des mouvements debout.
V – Les positions de départ
Les exercices précédemment cités peuvent être exécutés à partir du sol, d’un madrier, des supports ou en suspension.
- Les mouvements en suspension :
La position de départ peut se faire à 1cm du sol (suspension basse), sous les rotules, au dessus des rotules ou à mi-cuisses. Il est intéressant pour un athlète de travailler à partir d’une angulation critique vis-à-vis de sa discipline.
Exemples en rugby : il serait intéressant qu’un joueur de première ligne démarre ce mouvement en isométrie à partir du degré de flexion qu’il adopte dans une mêlée. Un ailier ou arrière pourrait travailler à partir d’une contraction plyométrique (contre-mouvement) comme lorsqu’il saute pour réceptionner une balle haute.
Objectifs :
– Travail de placement à partir d’une tension musculaire préalable (pré-fatigue)
– Travail d’équilibre et de gainage
– Travail du dos (vitesse, puissance ou force en fonction de la charge)
– Possibilité de travailler à partir d’une contraction isométrique ou plyométrique
– Possibilité de travailler à partir d’un signal visuel ou sonore pour travailler la vitesse de réaction
Le fait que l’amplitude du mouvement soit réduite implique que l’athlète devra exprimer une plus grande force explosive pour imprimer de la vitesse à la barre et passer dessous. Ce type d’exercice convient très bien dans un cycle de force explosive, puissance-force, puissance-vitesse ou vitesse.
- Les mouvements des supports :
La barre repose au départ sur des supports, sa hauteur varie généralement entre le dessus du genou et le haut de la cuisse, elle est réglable en fonction de l’objectif et des angulations critiques retrouvées dans la discipline de prédilection.
La faible amplitude du mouvement demande comme pour la suspension une grande force explosive à la chaine postérieure du fait que les hanches soient déjà relativement bien ouvertes. Mais contrairement à la suspension il n’y a pas de tension musculaire préalable, donc pas de pré-fatigue, l’athlète peut ainsi exprimer une plus grande force explosive.
En rapprochant la barre du centre de puissance qui se situe dans la région du pubis, la position de départ ressemble à celle que l’on retrouve dans les démarrages, les sauts, les placages, les mêlées et les lifts dans le rugby. Ces mouvements occasionnent moins de fatigue musculaire, c’est pourquoi je les trouve très intéressants à pratiquer régulièrement pendant la saison, quel que soit l’objectif du cycle. Ils sont de bons activateurs du système nerveux central.
De plus, j’ai pu constater qu’ils permettent aux athlètes débutants ou intermédiaires l’utilisation de charges lourdes assez rapidement en toute sécurité du fait qu’ils soient moins difficiles à exécuter techniquement et qu’ils limitent les problèmes de souplesse. L’utilisation de charges lourdes peut avoir un effet positif sur le mental et l’égo de l’athlète.
Mais comme pour les mouvements debout, ils ne peuvent remplacer les mouvements techniques sur le long terme.
VI – Les exercices combinés
Ce sont plusieurs mouvements techniques et/ou semi-techniques enchainés dans la même série. Exemple : 1 arraché debout + 1 arraché suspension sous genoux + 2 flexions d’arraché.
On peut utiliser ces exercices pour mettre l’accent sur une phase, corriger un défaut, ou pour entrainer une ou plusieurs qualités musculaires : force explosive (lourd-léger), endurance de force, enchainement d’un travail de vitesse avec un travail de puissance, travail cardio-vasculaire (!!!)… Les combinaisons étant infinies, l’entraineur peut laisser libre cours à son imagination.
VII – Les exercices dérivés
Les exercices dérivés des mouvements olympiques font partie de trois familles :
– Les flexions (squat nuque, squat clavicules, flexion d’arraché…)
– Les tirages (tirage lourd, tirage haut…)
– Les développés (développé couché, développé, développé nuque…)
Ce sont des mouvements poly-articulaires à charge libre utilisés dans les programmes de préparation physique habituels, ils ont l’avantage de travailler plusieurs groupes musculaires à la fois et de pouvoir s’adapter à n’importe quel protocole d’entrainement (renforcement musculaire, force maximale, endurance de force, puissance…).
En préparation physique, les exercices à charge libre devraient occuper au moins 80% des programmes.
Frédéric Marcérou – Team Physics
Fred Marcerou – Montpellier XIII
Licence STAPS mention Entrainement Sportif BPJEPS AGFF mention Force BEES 2e degré option Rugby à XIII
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